Marine Le Pen présentait ce mercredi 4 avril, depuis son siège de campagne rue du Faubourg Saint-Honoré, à quelques encablures de l'Élysée, ses traditionnels vœux à la presse. Le moment est toujours savoureux, la présidente du Front national, comme l'ensemble de son parti, entretenant avec les journalistes des relations pour le moins houleuses . Des médias – Mediapart et Quotidien pour ne pas les citer - sont toujours blacklistées de certains raouts frontistes. Les quotidiens locaux sont aussi régulièrement la cible des mairies FN, là en interdisant l'enregistrement de son conseil d'arrondissement , là en prenant pour cible personnellement des correspondants, là en boycottant des publications locales.
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Mais à quatre mois du premier tour de la présidentielle, point de friction. Marine Le Pen a bien précisé ne pas se reconnaître sous "la plume" et dans "l'œil" des journalistes, "ni la femme" qu'elle est, "ni le parti" qu'elle dirige", "ni les idées" qu'elle défend. Ce mercredi, cela n'était pas un problème. Elle a dit :
"C'est votre liberté. Je la reconnais et je défends cette liberté.
"
Regrettant que, parfois, "le commentaire médiatique s'arrête à la petite phrase, à la polémique futile du moment", Marine Le Pen a souligné la déconnexion qui peut exister entre certains médias et la réalité. Elle a aussi appelé de ses vœux une couverture objective de la campagne présidentielle à venir, tout en se posant, à nouveau, en garante de la liberté de la presse.
Elle a ajouté :
"J'ai une attention toute particulière à la liberté de la presse car la liberté de la presse est un élément consubstantiel de la démocratie. Je ne vous cache pas, d'ailleurs, mes craintes à ce sujet. La liberté de la presse recule dans notre pays puisque selon le classement établi par Reporters sans frontières, la France est passée de la 38e à la 45e place. Cette évolution n'est pas acceptable. Elle est extrêmement inquiétante pour une vielle et grande démocratie comme la nôtre.
"
La cheffe frontiste a donc tenu à rappeler combien il est nécessaire, dans une démocratie, d'avoir une presse libre.
E pourtant, une heure plus tard, à peine, Steeve Briois, maire FN d'Hénin-Beaumont, publiait un communiqué très officiel dans lequel il s'en prend à La Voix du Nord . Le quotidien régional est en grande difficulté et va subir un plan social prévoyant la suppression de 178 postes. Selon Les Échos , la direction met en avant "la baisse de la diffusion du journal papier tombée de 235.000 exemplaires payés en 2013 à 225.000 en 2015", pour justifier ce plan social, écrit Les Échos.
Pour Steeve Briois, cette mesure est "la malheureuse conséquence d’une ligne éditoriale qui s’est radicalement politisée ces dernières années", "au risque de ne plus faire d’information et d’imposer un militantisme rebutant". Le vice-président du FN, qui a une longue et tumultueuse histoire avec La Voix du Nord , a poursuivi :
"Nous avions prévenu la rédaction du dangereux fossé qu’elle était en train de creuser entre elle et son lectorat.
"
Et le n°2 du FN de prôner un "retour à une information pluraliste, réaliste, éloignée des idéologies, sans compromis avec les forces politiques qui la subventionnent". Il a ajouté :
"Eu égard à l’attitude de certaines antennes locales, et au sectarisme des éditorialistes, ce n’est pas pour demain.
"
Quasiment en simultané, la n°1 du FN loue la liberté de la presse - tout en notant une déconnexion avec la réalité - et le n°2 fustige la ligne éditoriale d'un quotidien régional.
À noter que Steeve Briois n'était pas présent au QG de campagne, ce mercredi. Hasard ou coïncidence, l'élu frontiste s'est fait remarquer, fin décembre, en traitant l'actrice Christine Jacob qui incarnera un personnage inspiré de Marine Le Pen dans le film Chez nous, de "pot à tabac" .
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